danser avec la tristesse d’une fin du monde

porte-plume – journal Le Ô

À l’Orient, les flammes d’un incendie couvent sous la cendre dégageant une odeur de phosphore. À l’Est, on exhume le cadavre rouillé des monstres d’acier. Au Sud, entre les feuilles mouillées de la forêt pluviale ou dans les déserts arides, les os des massacrés se désagrègent occultant le malheur des multitudes. À l’Ouest, la joie factice de l’abondance se dilue dans la monotonie des défaites et la gloire des gagnants.

Et puis, l’eau monte et les rescapés s’enfuient en canots pneumatiques. Et puis, l’eau monte et la voiture électrique conquiert des parts de marché. Et puis, l’eau monte et des politiciens s’égosillent sur la faute de l’autre. Et puis, l’eau monte et la conquête de Mars se donne une allure de bouée de sauvetage. Et puis, l’eau monte, mais on ne sait pas où elle s’arrêtera, alors… On danse avec la tristesse d’une fin du monde.

Toutefois, face au désastre, demeurent immuables, ces gestes et intentions esquissés une première fois dans la savane par de drôles de singes nus. Mains tendues, sourires qui élèvent l’âme au-dessus de la peur, regards qui réunissent, bras qui étreignent et consolent, naissance dans les herbes offrant l’espoir d’un avenir, sépulture fleurie.

Il est vrai, l’orage gronde et la foudre, force incompréhensible, s’abat au hasard, sème le trouble, mais ces gestes plus fort que la mort, ces gestes reviennent chaque jour malgré nos terreurs, ces gestes s’inscrivent avec la marque d’une paume posée depuis la nuit des temps sur la paroi d’une caverne, trace éternelle. Ces gestes obligent à rester humains.

Et puis, l’eau monte, un peu de musique, et l’on danse joyeusement sur la tristesse d’une fin du monde.

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